Concours de l’enseignement agricole : du nouveau... Mais cela suffira-t-il ?

Publié le 22/09/2022

Le décret modifiant les concours et la formation initiale dans l’enseignement agricole vient d’être publié. Il formalise les nouvelles dispositions et notamment l’instauration de deux voies distinctes de recrutement par concours pour répondre au manque d’attractivité du métier conjugué aux spécificités de « l’agri ».

L’enseignement agricole privé n’échappe pas à la crise de recrutement que subit le métier d’enseignant dans notre pays. Pour preuve, la promotion des lauréats des concours internes toutes disciplines confondues de la session 2022, n’excèdera pas une vingtaine de stagiaires...Pire encore, aucun lauréat de concours externe ne rejoindra un établissement du privé temps plein à l’issue de son stage. Ils ont en effet choisi d’intégrer l’enseignement public en raison de meilleures conditions de rémunération (meilleure prise en compte des missions particulières notamment), de meilleures perspectives en matière de retraite, et de meilleures obligations de service. D’autres encore ont préféré renoncer à l’enseignement pour un autre projet.

La nécessaire adaptation du mode de recrutement...

Face à la baisse constante des taux de rendement des concours, le ministère de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA) a emboité le pas de l’Éducation nationale pour proposer une réforme des concours et de la formation initiale.

La Fep-CFDT, par sa participation active et constructive aux réunions des différents groupes de travail ou des sessions plénières du CCM, a joué un rôle important dans la définition de solutions spécifiques à la réalité de l’enseignement agricole.

...en accord avec les spécificités de l’enseignement agricole

Ainsi, l’architecture des concours se trouvera complètement modifiée dès la session 2023. Le recrutement se fera par deux voies distinctes selon la discipline choisie. À l’instar de ce qui se pratique au ministère de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS), la détention d’un Master 2 sera nécessaire pour se présenter aux concours de la voie A qui regroupe les matières générales et traditionnelles. Les stagiaires seront alors affectés en établissement avec un service réduit et devront suivre une formation au sein de l’École nationale supérieure de l’enseignement agricole (ENSFEA) de Toulouse. En revanche, le MASA n’a pas souhaité inclure le dispositif de préprofessionnalisation par le recours aux alternants dans sa réforme. La présence d’une seule école supérieure délivrant le master MEEF semble avoir été un obstacle rédhibitoire pour l’administration...

La création d’une voie B permettra aux candidats de concourir avec au minimum une licence dans des disciplines dites rares pour lesquelles on a observé des difficultés de recrutement. Les lauréats seront affectés à l’ENSFEA en qualité de stagiaires où ils suivront une formation de deux ans et auront l’obligation d’obtenir le Master MEEF délivré par cette structure.

Le problème récurrent du dimensionnement

Si la réforme a reçu un avis favorable de la Fep-CFDT lors de la séance du CCM du 8 juillet dernier (voir notre article), le syndicat n’a pas manqué de souligner le nombre toujours trop faible des concours au regard du chiffre annuel des entrants dans l’enseignement privé temps plein. Certes la fongibilité (interne vers l’externe et entre disciplines d’interne) obtenue par la Fep pourrait au moins permettre de ne pas perdre de postes mais ne règlera en rien le problème récurrent du dimensionnement. Rappelons qu’il est en effet en contradiction avec la règlementation et le décret 89-406 qui prévoit bien une entrée dans le métier par le concours. Le recrutement sur titres en catégorie 3 n’est en effet qu’un recours laissé aux chefs d’établissement au cas où tous les postes ne seraient pas pourvus par la voie « normale ». Cette inversion de la norme conduit au gonflement systématique de la catégorie 3 et produit des cohortes d’agents encore sous-payés malgré la revalorisation des grilles et sans perspectives de carrière.

Des mesures qui ne suffiront pas

Même si les évolutions proposées semblent être de nature à redonner à notre métier une certaine attractivité, il s’agira d’en mesurer les effets lors de bilans que la Fep-CFDT a d’ores et déjà demandés...

Mais la désaffection dont souffre notre métier ne s’explique pas uniquement par un modèle de recrutement trop souvent inadapté. Les causes sont plus profondes. A commencer par une rémunération en décalage avec le niveau d’étude exigé ainsi que des missions de plus en plus nombreuses et chronophages. Mais aussi par un manque de considération, de reconnaissance, de soutien de notre employeur et plus globalement de la collectivité. L’absence de perspectives ainsi qu’un accompagnement souvent insuffisant et inefficace en sont d’autres facteurs notables... La liste est longue. D’aucuns diraient qu’il s’agit d’un chantier de grande ampleur. Sans doute, mais il faut faire vite.