Accompagné cherche accompagnant
L'accompagnement des élèves en situation de handicap dans les établissements scolaires français est marqué par d'importantes difficultés. Malgré les intentions affichées, de nombreux élèves notifiés par la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) se retrouvent en attente d'une aide humaine ou avec un nombre d'heures insuffisant.
Cette carence en personnel complique le travail des enseignants. En effet, ceux-ci doivent accueillir et accompagner des élèves sans l'aide nécessaire.
Des effectifs insuffisants pour des besoins croissants
Les raisons invoquées pour le manque d’AESH (Accompagnant d'élèves en situation de handicap) va de manque de moyens financiers et humains à des difficultés administratives. Chaque année, c’est l’État qui détermine le nombre de création de postes d’accompagnants d’élèves en situation de handicap sur la France, postes qui sont ensuite répartis sur le territoire en fonction des besoins. Pour la rentrée 2025, il était question du recrutement de 2 000 équivalents temps plein, ils étaient 3 000 pour la rentrée 2024. Pour l’année scolaire 2025/2026 c’est environ 140 000 AESH qui ont pris le chemin des classes. Cependant ce nombre reste insuffisant pour accompagner les environs 352 000 élèves notifiés. Et c’est près de 50 000 élèves dans cette situation qui étaient sans solution d'accompagnement à la rentrée 2025, marquant ainsi une augmentation par rapport à l'année précédente.
Précarité du Métier d'AESH
Le métier d’AESH est en crise, comme celui d’enseignant. Les AESH, majoritairement des femmes, sont rémunérés sur une grille indiciaire alignée sur le Smic horaire. La majorité des AESH travaillent à temps partiel. La quotité de travail la plus fréquente est de 62% soit un accompagnement de 24 heures par semaine en classe, calculé sur 41 semaines par an, incluant le temps de préparation et de concertation. Chaque année, l’Éducation nationale perd de nombreux AESH qui préfèrent un emploi mieux payé et mieux reconnu.
Les AESH sont des agents contractuels de droit public. Le recrutement se fait par des contrats de droit public (CDD de trois ans, renouvelable une fois, puis CDI). L'absence d'un statut de fonctionnaire de catégorie B, revendiqué par les syndicats, prive les AESH de garanties d'emploi et de progression salariale stable, contribuant à la faible attractivité du métier et au fort turnover.
La faiblesse des salaires, le temps partiel imposé, et le manque de prise en charge des contraintes liées à la mobilité sont les principaux facteurs qui font de la profession d'AESH un métier essentiel, mais profondément précaire.
Les effets de la pénurie d’AESH
Dans certaines régions, les MDPH se sont vu imposer de ne plus notifier d’AESH individualisés par les rectorats en raison du risque de recours en justice par les familles en cas de non-respect du quota d'heures. A contrario, certaines MDPH se battent encore pour faire respecter les droits des élèves en situation de handicap.
La pénurie d’AESH impose une certaine flexibilité à ceux qui sont en poste. En effet, ils peuvent être amenés à intervenir sur un nombre d'établissements de plus en plus grand, parfois éloignés les uns des autres et à accompagner un nombre croissant d’élèves en situation de handicap.
Le remboursement des frais de transport reste un point de tension majeur. Le cas des 24 AESH licenciés en Ille-et-Vilaine, à la rentrée 2025, pour avoir refusé d'étendre leur secteur d'intervention sans prise en charge des frais kilométriques, est emblématique. Certains AESH étaient pourtant titularisés après 6 ans de service. Pour des salaires modestes, les frais d'essence ou l'usure du véhicule deviennent une charge insoutenable, aggravant la précarité.
Un Accompagnement Incomplet et Précaire
Les élèves ayant une notification d'accompagnement individualisé voient rarement leur quota d'heures respecté. Il arrive que des élèves notifiés pour 18 heures bénéficient de moins de 6 heures d'accompagnement. Les élèves avec une notification d'AESH mutualisé sont souvent les plus pénalisés.
Dans le cas de notification d’AESH mutualisé, c’est l’équipe éducative qui doit définir le nombre d’heures d’accompagnement dont les élèves ont besoin. Mais que dire quand il n’y a qu’un AESH pour 10 élèves et surtout lorsque certains ont une notification de plus de 10 heures. Les chefs d’établissements attendent la prochaine campagne de recrutement pour pouvoir, peut-être enfin, répondre aux besoins de chacun de leurs élèves en situation de handicap.
Du Pial au Pas
Avec les Pôles inclusifs d'accompagnement localisés (Pial), la gestion des emplois du temps et des quotités horaires des AESH est souvent confiée à un chef d'établissement, source de complexité et parfois de retards dans la contractualisation. La mutualisation est parfois telle qu'un AESH peut avoir à accompagner un grand nombre d'élèves dont certains ont des besoins importants et ceci dans plusieurs établissements.
Les Pial devraient laisser la place aux Pôles d'appui à la scolarité (Pas) qui sont dirigés par un représentant de l’Éducation nationale et un éducateur du médico-social. Ils devraient également gérer l’ensemble des élèves à besoins particuliers. En test l’an dernier, les Pas commencent à se généraliser. Il serait souhaitable que cette nouvelle instance résolve les problèmes soulevés par le fonctionnement des Pial.
A quand la prise en compte de l’importance de ce métier devenu indispensable pour le quotidien de près de 400 000 élèves en situation de handicap ? Et lorsque le ministre nous explique que les élèves en situation de handicap sont une de ses priorités, pourquoi un tel manque de réponse aux besoins ? Entre les intentions et la réalité plusieurs mois d’attente pour la notification par manque de personnel dans les MDPH, puis des retards dans l’accompagnement par manque d’AESH. Beaucoup de crainte pour la famille mais également pour les enseignants qui doivent accueillir et accompagner des élèves qui ne sont pas autonomes dans une classe où l’autonomie est une priorité pour tous.