
Réformes du Bac pro : la Fep-CFDT auditionnée à l’Assemblée nationale
La Fep-CFDT a été auditionnée par les député∙e∙s Géraldine Bannier et Jean-Claude Raux de la Commission des affaires culturelles et de l'éducation de l’Assemblée nationale, concernant la mission flash concernant les impacts des réformes successives sur le baccalauréat professionnel. Ce fut l’occasion de faire le bilan des dernières réformes tout en pointant les améliorations à y apporter.

Une succession de réformes sans cohérence globale
La Fep-CFDT constate que ces dernières années, il y a eu une succession de réformes concernant la voie professionnelle, sans réelle cohérence. L’empilement des réformes ne permet pas d’appropriation ou de stabilité dans les lycées professionnels de la part des équipes. Depuis le passage d’un bac en 3 ans au lieu de 4, (avec la suppression des BEP), les élèves ont moins de compétences à la sortie du bac. Cela représente une perte de 71 heures d’enseignement professionnel en classe de terminale depuis la rentrée 2024. Il y a un réel souci d’insertion professionnelle.
La mise en place de la mixité des publics reste problématique. Elle engendre de réelles difficultés dans sa mise en place, avec notamment la différence de synchronisation des emplois du temps entre élèves sous voie scolaire et les apprentis. Elle met en difficulté les maîtres de l’Enseignement privé sous contrat, qui à ce jour, n’ont pas de cadrage légal clair entre leur statut spécifique, différent de celui des enseignants du public, et leur intervention dans des CFA privés, gérés par des Ogec et financés par les OPCO. De plus, la Fep-CFDT a rappelé que les directives du ministère précisant que la présence d’apprentis doit donner lieu à une prise en charge partielle par le CFA des dépenses de rémunérations des personnels exerçant dans les classes mixtes au prorata de la proportion d’apprenti∙e∙s dans la classe, par le biais d’une convention entre l’établissement et l’académie, ne sont toujours pas appliquées.
Si la Fep-CFDT défend la co-intervention comme levier de pédagogie de projet, elle précise qu’elle doit être construite collectivement, sur un temps concerté et avec des moyens dédiés, inclus par exemple, dans les 18 heures hebdomadaires.
La dernière réforme en date, concernant l’année de terminale de 2023, a suscité de vives critiques de la part des organisations syndicales, dont la CFDT. Après un boycott en Commission spécialisée des lycées, au Conseil supérieur de l’éducation et avec la grève du 12 décembre 2023, c’est un rejet unanime qui s’est opéré (à lire ici).
L’enjeu de l’orientation
On constate que malgré les réformes, les élèves sont toujours majoritairement issus des mêmes catégories socioprofessionnelles (ouvriers, employés, sans emploi). Comme lors de l’audience concernant l’orientation (à lire ici), la Fep-CFDT a souligné le fort déterminisme social et géographique (avec la carte des formations), qui reste une entrave au choix ouvert et émancipateur des jeunes, réduisant leurs possibilités d’orientation. Nous sommes loin de la « voie de l’excellence » souhaitée par le ministère. La Fep-CFDT souhaite pour les jeunes, des parcours d’orientation qui se construisent sans stéréotype de genre, sans déterminisme social et/ou territorial. Les choix d’orientation sont trop fortement conditionnés par des représentations sociales des métiers encore très sexuées. Une refonte de l’orientation doit intégrer une éducation à l’égalité dès le collège et un travail en lien avec les professionnels pour déconstruire les stéréotypes. Des actions concrètes et continues, avec les familles et les partenaires de l’orientation, sont nécessaires pour ouvrir l’ensemble des spécialités à tous les profils d’élèves. Cela demande notamment que les enseignants reçoivent des formations spécifiques afin de bien assurer leur mission de conseil en orientation. Cela rendra plus efficace les heures prévues pour ce sujet.
Premier bilan du parcours en Y
Même s’il est trop tôt pour faire un véritable bilan du parcours en Y, on constate cependant que la mise en place du parcours différencié (dit aussi « parcours Y ») a désorganisé les établissements et les équipes pédagogiques. Initialement prévu pour reconquérir le mois de juin, c’est le mois de mai qu’il faut dorénavant reconquérir. Il y a moins de cours pour les élèves, notamment pour ceux de matière professionnelle. La Fep-CFDT rappelle que les stages ne permettent pas d’apprendre toutes les facettes du métier : seuls les cours de matière professionnelle le permettent. La mise en place de ces parcours (certains en stage 6 semaines depuis la mi-mai, d’autres en cours pour préparer leur entrée en BTS, le tout entrecoupé par des épreuves terminales) est synonyme d’absentéisme important chez les élèves et d’une désorganisation des établissements, mais aussi d’une nouvelle dégradation des conditions de travail des professeur·e·s de lycée professionnel.
La Fep-CFDT avait demandé un moratoire d’un an, sans avoir été hélas, entendue. Elle demande à présent un bilan de la réforme et tient à y être associée.