Enseignement agricole : Parcoursup à la loupe

Publié le 01/02/2022

La Fep-CFDT était la seule organisation syndicale du privé à participer au groupe de travail chargé d’analyser en détail les résultats de Parcoursup depuis le lancement de la plateforme il y a 4 ans. Une réunion très riche en informations pour mieux comprendre la dynamique du recrutement des BTSA.

Le 25 janvier dernier, la Fep-CFDT (seule organisation syndicale du privé présente) participait à un groupe de travail « Parcoursup » organisé par la Direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER). La réunion a commencé par un point sur le calendrier 2022. Françoise Marot, chargée de mission Parcoursup pour le ministère de l’Agriculture, a rappelé les grandes dates, qui seraient les différents intervenants et leur rôle. Quelques points de vigilance ont été mis en avant comme la complétude du dossier du candidat (tout dossier incomplet étant rejeté), la fin de la période de formulation des vœux au 29 mars et l’indispensable confirmation de ceux-ci lors de la fin de la phase d’inscription…

Pour les établissements, le ministère a appelé à la vigilance sur la capacité d’accueil (qui ne peut pas être revue à la baisse) et à développer la pratique du « surbooking » et de l’utilisation du rang limite d’appel, afin de classer suffisamment de jeunes pour avoir plus de réponses positives dès le premier jour et remplir ainsi plus vite la classe. Mme Marot a également rappelé le rôle des CAES (Commissions d’accès à l’enseignement supérieur) chargées, dans chaque académie, d’étudier la situation des élèves dont aucun voeu n'a été retenu. Ceux de l’enseignement agricole ne doivent pas hésiter à saisir cette commission dont les Draaf (Directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt) sont membres. La Fep-CFDT est intervenue pour souligner l’inégalité qui existe entre les jeunes par rapport aux dispositifs d’accompagnement (au niveau des familles mais aussi des établissements) ainsi que la fracture numérique (zones blanches ou difficultés dans la maîtrise des outils du numérique pour les formalités administratives). Nous avons également soulevé le problème d’étanchéité entre la formation initiale voie scolaire et l’apprentissage. Beaucoup de jeunes inscrits en formation initiale s’évaporent dans l’apprentissage dans le courant de l’été ce qui peut mettre en grande difficulté certains établissements. Le ministère est tout à fait conscient de ce probléme et recommande pour les filières les plus touchées par ces fuites (lire plus loin) de pratiquer le surbooking avec la marge de 20% supplémentaire (et au-delà avec l’autorisation de l’autorité académique) afin de combler les places laissées libres par les désistements.

Augmentation de la capacité d’accueil et boom de l’apprentissage dans le privé

Concernant le bilan Parcoursup, depuis l'ouverture de la plateforme en 2018, la capacité d'accueil en BTSA a augmenté de +23,5%, principalement en apprentissage (+55%) dans les établissements privés sous contrat (+142%). Preuve en est l’explosion de l’apprentissage dans nos établissements, bien souvent dans les classes où est pratiquée la mixité des publics avec des enseignants payés par l’Etat qui enseignent face à des apprentis ! La part des places sous statut étudiant est de 56% en 2021 contre 64,8% en 2018. Sous statut étudiant, ce sont les spécialités « productions animales », « technico-commercial » et « gestion et protection de la nature » pour lesquelles la progression en nombre de places est la plus importante. L'augmentation des places en apprentissage est remarquable dans les spécialités « ACSE(1) », « technico-commercial », « aménagements paysagers ».

Concernant l’évolution des propositions acceptées en BTSA, après avoir augmenté pendant 2 ans, leur nombre diminue en 2021(par la voie scolaire). Cette baisse est particulièrement forte si on compare les résultats de 2020 et 2021 (-11,9%) mais est à relativiser sur l'ensemble de la période (-1,7%), le taux de remplissage passant de 75,2% en 2018 (public = 83,4%, privé = 65%) à 69,3% (public = 76,2%, privé=60%) en 2021. Ces chiffres doivent être analysés aux vues des progressions sur l'apprentissage.

Au niveau de l’analyse par secteur professionnel, pour la filière « services / transformation », le BTSA technico-commercial est le plus impacté par la baisse de recrutement. Malgré une augmentation de la capacité d'accueil sur la période, le nombre de propositions acceptées est en diminution et le taux de remplissage est passé de 64,8% à 55% entre 2018 et 2021.

Le secteur « aménagement de l'espace » ne subit pas de grosses variations sur la période, seul le BTSA Gemeau(2) est légèrement en retrait. Pour les filières « production agricole », les formations les plus touchées sont le BTSA ACSE et le BTSA agronomie-productions végétales.

Transfert vers l’apprentissage et les BUT

La comparaison entre l'augmentation des capacités d'accueil des formations en apprentissage et la diminution du nombre de propositions acceptées en BTSA technico-commercial, ACSE ou agronomie-productions végétales suppose un transfert des admis du scolaire vers l'apprentissage.

Concernant l’origine des candidats, les jeunes admis en BTSA sous statut étudiants sont principalement diplômés d'un baccalauréat technologique ou professionnel jusqu'en 2020. A la rentrée 2021, le nombre d'admis issus de ces formations diminue fortement (bac techno : -4 points, bac pro : -2 points). Cette diminution est à mettre en corrélation avec la création des Bachelors universitaires de technologie (BUT), l'augmentation du nombre de places offertes aux bac technologiques en IUT (quotas 50%) et le développement de l'apprentissage vers lequel se destinent les candidats de bac pro. A noter toutefois, la progression du nombre de candidats issus de filières générales (+22%). A la rentrée 2021, 79,7% des admis en BTSA sont des jeunes scolarisés en classe de terminale, 51,5% dans un établissement du Maa(3), 28,2% dans un établissement du MENJS(4). 20,3% sont des jeunes non scolarisés ou en réorientation. Les candidats admis sont principalement issus de la région de l'établissement d'accueil même si la tendance est à davantage de mobilité.

Malgré une diminution du nombre d'élèves en classe de terminale de l’enseignement agricole entre 2018 et 2021, le nombre de jeunes inscrits sur Parcoursup a progressé. En 2021, 99,4% des « bac généraux » et 97,7% des « Bac techno » ont finalisé leur inscription mais seulement 71,9% des « bac professionnel ». En 2021, la diminution du nombre de candidats ayant fait au moins un vœu en phase principale est nette par rapport à l'année 2020, et ce quelle que soit la série du bac. C'est le contraire sur la procédure apprentissage. Alors que le taux admis/inscrits avait progressé de plusieurs points entre 2018 et 2020, il s'est stabilisé en 2021. Le faible taux d'admission des candidats issus de bac professionnel est sans doute lié à un taux d'admission plus fort sur l'apprentissage sans que ces données puissent être consolidées via les données Parcoursup. Le ministère a toutefois mis en garde sur l’effet d’aubaine de l’apprentissage avec des financements attractifs qui risquent de ne pas durer.

Difficultés de communication sur nos BTSA

Pour conclure, la Fep-CFDT est intervenue sur l’impact des BUT avec une réflexion à mener pour une formation en 3 ans (palier à deux ans avec une possibilité de poursuite facilitée) et une possible bi-qualification. Le ministère a précisé qu’il n’était pas envisagé de transformer les BTSA en 3 ans dans un souci de modularité et de complémentarité vis-à-vis des autres formations (un jeune sur deux arrête ses études après un BTSA). Une autre organisation syndicale a toutefois proposé de créer une 3e année qui pourrait précéder l’entrée en BTSA notamment pour les jeunes issus de bac pro qui depuis la réforme du bac pro 3 ans ont plus de mal à franchir la marche des études supérieures. Marie-Aude Stofer, cheffe du bureau des formations de l'enseignement supérieur à la DGER a précisé que l’inspection allait mener une étude sur la réussite des bac pro en BTSA qui permettra d’y voir plus clair. La Fep-CFDT a également souligné le manque d’attractivité de la plaquette de présentation des BTSA et plus largement les difficultés de communication sur nos BTSA (intitulés peu porteurs). Le ministère a dit prendre en compte cette problématique dans les travaux de rénovation.

Enfin, nous avons évoqué le problème des filières de candidatures issues de l’étranger et notamment d’Afrique (particulièrement le Sénégal). Des dizaines de dossiers copiés/collés génèrent un travail de tri très chronophage dans les établissements. Le ministère a expliqué n’avoir aucune solution, pour le moment, pour détecter ces fausses candidatures (ni de les différencier de véritables candidatures), mais il y a la possibilité de ne pas les classer. Pour les véritables candidatures issues de l’étranger il y a aussi des incertitudes à gérer sur les délais d’obtention des visas et des arrivées parfois tardives…

  • ACSE : analyse et conduite des systèmes d’exploitation
  • Gemeau : Gestion et maîtrise de l’eau
  • Maa : Ministère de l’agriculture et de l’alimentation
  • MENJS : Ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports

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