Apprentissage et insertion professionnelle

Publié le 25/05/2023

D’après une récente étude du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Cereq), l’apprentissage est la voie privilégiée pour l’insertion professionnelle des jeunes. Mais à quel prix…

Le lycée a récemment connu des évolutions importantes, comme en 2018 avec la réforme de l’apprentissage et, depuis 2020, l’explosion de l’alternance. La filière professionnelle est par essence celle de l’insertion dans la vie active. Cependant, selon l’étude menée par le Cereq, qui se penche sur la génération sortie du collège ou du lycée en 2017, on note des différences entre la voie scolaire et celle de l’alternance.

 

L’apprentissage fait mieux que le cycle scolaire…

En cycle scolaire, 43 % des détenteurs de CAP et 59 % de ceux d’un baccalauréat professionnel connaissent une trajectoire dominée par l’emploi ; pour la voie de l’apprentissage, c’est 63 % pour les CAP et 77% pour les bac pro. Certaines filières sont plus ouvertes à l’embauche des jeunes sortants, comme celles à dominante industrielle, en leur offrant un emploi à durée indéterminée. Les filières tertiaires sont quant à elles moins génératrices d’embauche.

… mais il coûte cher

Ces chiffres flatteurs de l’insertion des jeunes sortant des filières professionnelles par apprentissage et la mise en exergue de cette voie par le Cereq ne doivent néanmoins pas faire oublier la politique dispendieuse mise en place par la loi de 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Les aides financières aux entreprises ont de toute évidence boosté l’attractivité de l’apprentissage. Si le succès quantitatif de cette réforme est indéniable, le déficit abyssal de France Compétences − qui assure le financement, la régulation et l’amélioration du système de la formation professionnelle et de l'apprentissage − l’est tout autant : il atteint 11.2 milliards d’euros en 2020 ! 

 

Insertion dans l’emploi de la génération 2017

L’étude du Cereq porte également de façon plus générale sur la sortie du système scolaire des deux millions de jeunes qui ont quitté le collège ou le lycée, avec ou sans diplôme, en 2017. Elle laisse apparaître de nombreuses disparités concernant leur insertion dans la vie professionnelle.

Un peu moins de la moitié des « sortants » de l’enseignement secondaire en 2017 possèdent un baccalauréat ou un diplôme équivalent et 31 % sortent sans diplôme. C’est à peine 33 % de ces jeunes sortants du système scolaire qui intègrent directement la vie active et 17 % d’entre eux n’ont occupé aucun emploi entre 2017 et 2020. On peut également remarquer que six mois après leur sortie, 48 % de jeunes ne sont ni dans l’emploi ni en formation. En octobre 2020, 28 % de ces jeunes sortants sont au chômage ou inactifs et 48 % en activité.

Les portes de l’embauche s’ouvrent plus facilement avec un diplôme. Trois années après leur sortie, c’est seulement 25 % de jeunes sans diplôme qui connaissent une trajectoire dominée par l’emploi pour 50% de jeunes possédant un CAP. La vocation propédeutique des filières générales et technologiques est beaucoup moins propice à l'entrée dans le marché du travail que la voie professionnelle.

Au regard de cette étude, on peut observer de fortes inégalités selon les filières et les diplômes (obtenus ou pas) dans l'insertion professionnelle.

Et en amont

Il aurait été intéressant d’évoquer la sociologie des « sortants » du secondaire, tout comme l’orientation en collège : les enfants issus des classes populaires ont 7,9 fois plus de chances que les enfants des milieux les plus favorisés de fréquenter l’enseignement professionnel. Les difficultés précoces d’apprentissage ont des significations différentes selon l’origine sociale et influent sur le parcours scolaire de l’élève. Comment ne pas évoquer le fonctionnement inégalitaire du collège dont on sait qu’il tend à augmenter les écarts sociaux d’acquisition scolaire, ainsi que le souligne Marie Duru-Bellat dans Les inégalités sociales à l’école. Une école, qui est tristement créatrice de division sociale « en socialisant les individus aux rôles qu’ils seront amenés à jouer dans leur vie future », comme le dit Ugo Palheta dans La Domination scolaire.